Cela avait été annoncé il y a de nombreux mois. Mais c’est depuis ce début 2023 qu’est effective la reprise des supermarchés Carrefour Market Groupe Mestdagh par l’enseigne Intermarché. La nouvelle direction souhaite franchiser les magasins. Les travailleurs sont dans l’angoisse… Dans l’attente de savoir à quelle sauce ils vont être mangés.
51 magasins dans l’incertitude
La nouvelle direction vient de présenter dans les très grandes lignes son projet : l’ensemble des 51 magasins passerait en franchise. Nouvelle incertitude, le timing : cela peut aller vite… ou cela peut durer. Malgré cela, la direction scande à tout va que l’emploi serait garanti. Rien ne changerait pour les travailleurs et les travailleuses et leurs conditions de travail. Sauf de manière… « marginale ».
Le SETCa avertit: « Nous ne sommes pas dupes. Dès les premiers conseils d’entreprise, les organisations syndicales ont déposé toute une série de questions. La direction n’a pas apporté de réponses satisfaisantes. Plus celle-ci se veut rassurante dans ses discours, plus nous trouvons que la ficelle est grosse et difficile à croire. »
Alors pourquoi franchiser ?
D’après les nouveaux dirigeants, dans les faits, rien ne devrait changer. Ni les horaires, ni la rémunération, ni les contrats, ni le travail du dimanche, ni les prestations tardives… Pourquoi alors franchiser ?
La direction ne cesse de se cacher derrière – ce que nous appelons dans le jargon juridique – « une CCT 32 bis ». C’est-à-dire une convention qui impose au repreneur indépendant d’appliquer ce que le travailleur a comme salaire au moment de la reprise. Comment Intermarché peut-il valablement nous garantir que des indépendants vont respecter les obligations issues des contrats de travail, des CCT d’entreprise ou encore des CCT de la CP 202 ? « On nous disait d’avoir confiance, que tout ce qui existait (sous Mestdagh) sera poursuivi tel quel. Mais des accords signés sont remis en cause », déclarait Myriam Delmée, Présidente du SETCa, le 18 janvier dernier.
Selon la direction toujours, le modèle commercial de la franchise est le seul qui permettrait un dynamisme commercial suffisant pour développer le chiffre d’affaires et permettre aux magasins de retrouver le chemin des bénéfices. Mais, pourquoi franchiser dès lors que la seule plus-value d’un indépendant serait son dynamisme commercial ? Si le modèle Intermarché est si dynamique commercialement parlant, pourquoi ne serait-il pas simplement exploitable dans le cadre de magasins intégrés ? De cette manière les travailleurs seraient effectivement assurés de garder l’intégralité de leurs conditions de travail.
Les travailleurs mènent des actions
Cinq magasins bruxellois sont en grève depuis mercredi dernier. Le front commun syndical a également mené une action ce jeudi en distribuant des tracts aux travailleurs. Ils sont pas moins de 1.800 a être concernés par la reprise de Mestdagh. Certains y travaillent depuis 40 ans. « On ne s’attendait pas à ce que la totalité des magasins franchisés soient repris. Ni de basculer dans autre commission paritaire » explique Giuseppe Migliozzi, délégué à la Centrale Mestdagh, à Gosselies. « On a été vendus comme du bétail », regrette-t-il. « Les principales craintes des travailleurs : la perte du pouvoir d’achat. Est-ce que leur ancienneté sera comptabilisée? Et pire encore, la perte de leur job. » Giuseppe en est convaincu : un repreneur ne va pas garder les travailleurs dans les mêmes conditions.
On a été vendus comme du bétail.
Giuseppe Migliozzi, délégué à la Centrale Mestdagh, à Gosselies
Les organisations syndicales déterminées
Les organisations syndicales ne veulent pas jouer les oiseaux de mauvaise augure, loin de là. Néanmoins, il faut constater que la direction vient sans réponse crédible. Elle ne veut pas s’engager pour offrir des garanties sérieuses pour l’avenir des travailleurs.
La bateau Mestdagh est à la dérive depuis un bon moment. « A nouveau, on nous balade, nous balade et nous balade encore. Ce projet de franchisation à l’extrême est dangereux. Nous craignons qu’il s’assimile à une manière d’écarter subtilement la concertation sociale. Qu’il mène à terme à la destruction des conditions de travail des personnes qui y sont occupées », poursuit le SETCa. Un précédent qui pourrait être dramatique pour le secteur du commerce tout entier.
« Nous n’abandonnerons pas les travailleurs Mestdagh et nous ne nous laisserons pas aveugler. » Les organisations syndicales sont déterminées à obtenir des réponses sérieuses à leurs questions. Et à tout mettre en œuvre pour préserver les droits et les intérêts des travailleurs et travailleuses.
« Rien ne changerait pour les travailleurs et les travailleuses et leurs conditions de travail. Sauf de manière… “marginale”. »: vraiment? Alors comment expliquer que depuis la reprise du Carrefour Mestdagh de la Rue de Jerusalem à Schaerbeek par Intermarché, tout le personnel en magasin a changé?