EDITO | Nous, toutes et tous

EDITO | Nous, toutes et tous

Le 11 juillet, les Nations Unies célèbrent la « Journée de la population ». Qui, pour la première fois cette année, concerne 8 milliards d’individus. 8 milliards, chacun et chacune avec un parcours, des espoirs, un vécu. Et un avenir commun. Ensemble, toutes et tous, nous formons ce « nous » interconnecté. Ce « nous » qui dès à présent doit affronter et relever des défis colossaux, notamment sociaux et climatiques.

Mais si l’image est belle, les faits le sont moins. Au cœur de ce « nous » idéal, toutes et tous ne partent pas à armes – et à opportunités – égales. Les disparités restent profondes. L’accès aux soins, à une vie et à un travail dignes, à l’éducation est conditionné par nombre de facteurs : lieu de vie, origine ethnique, classe sociale, genre… Les écarts sont béants.

Droits des travailleurs

Du côté du monde du travail, pas de surprise : les droits des travailleurs et travailleuses reculent. La Confédération syndicale internationale (CSI) publiait un rapport sur le sujet voici quelques jours. Dans le monde, la proportion de pays qui arrêtent et emprisonnent des travailleurs et leurs représentants syndicaux est passée de 25% en 2014 à 46% en 2023. Des travailleurs ont été victimes d’attaques violentes dans 44 pays, de meurtres dans 8.

Par ailleurs, l’OIT l’indique que le phénomène mondial de l’”esclavage moderne” est en augmentation ces dernières années. Des groupes spécifiques y sont particulièrement vulnérables : femmes, enfants, sans-papiers, personnes qui fuient un pays en guerre… L’on parle ici de travail forcé, de mariages serviles, d’exploitation sexuelle à des fins commerciales… Un  chiffre, encore : 12 % des personnes soumises au travail forcé sont des enfants.

Fracture numérique

Dans un monde toujours plus connecté, rapide, l’accès aux technologies est crucial pour participer activement à la société, à l’économie, pour accéder au flux instantané de l’information. Là encore, des inégalités. Un tiers de la population mondiale ne dispose d’aucun accès à internet. Plus encore, d’aucune connaissance en la matière. La fracture numérique frappe davantage les jeunes filles et les femmes, pour qui les portes de l’école restent fermées en de nombreux endroits.

Pas seulement « ailleurs »

Que l’on ne s’y trompe pas. Ces inégalités existent dans notre pays également. En Belgique, une personne sur cinq se trouve en situation de pauvreté et/ou d’exclusion sociale. 28% des Belges ne disposent pas des connaissances nécessaires pour utiliser internet en toute sécurité, et la fracture numérique se manifeste particulièrement chez les personnes à faible revenu. Avec en arrière-plan un accès rendu compliqué aux services du quotidien, qu’ils soient administratifs, bancaires ou liés à la santé…

Tout cela dans un contexte de pression constante sur les droits des travailleurs et travailleuses. Selon l’index des droits de la CSI, la Belgique se trouve sur la liste des pays où se produisent des « violations régulières des droits » des travailleurs et travailleuses. Les attaques au droit de grève et de manifester nous le prouvent en effet.

La fiscalité ne doit plus être un tabou

Lutter contre les inégalités exige de revoir le système de répartition des richesses. L’outil par excellence : la fiscalité. Au niveau belge, européen et mondial, l’impôt reste le cœur du problème et de la solution. Le défi climatique et social appelle à un changement de paradigme, avec un retour important des investissements publics, notamment en matière de transports en commun, d’énergie renouvelable, de services aux personnes, de soins de santé… Il faut donc s’assurer que les autorités publiques disposent de suffisamment de moyens budgétaires pour réaliser ces investissements. Investissements qui doivent être vus non comme des dépenses qui creusent la dette publique mais comme des choix stratégique pour l’avenir, comme un projet de société inclusive.

Une réforme fiscale est sur la table en Belgique. Malheureusement, selon nous, elle ne répond pas de manière efficace et juste à ces priorités. Nous le redisons, il est temps de réduire la pression sur le monde du travail, de mettre fin à l’accumulation excessive de richesses, et d’instaurer un impôt sur les gros patrimoines.

Solidarité, fiscalité juste, lutte contre les inégalités… Tout cela forme un tout, un levier puissant pour construire le monde que nous voulons. Nous, toutes et tous.

Thierry Bodson et Miranda Ulens

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