Réforme des pensions | « 1/3 des gens qui pouvaient prétendre à la pension minimum pourraient perdre 200 à 300€/mois »

Réforme des pensions | « 1/3 des gens qui pouvaient prétendre à la pension minimum pourraient perdre 200 à 300€/mois »

Article mis à jour le 20/07 à 15:00

Le kern a finalement accouché d’une réforme des pensions, à terme, avant le 21 juillet. Une réforme fort attendue, largement annoncée comme positive mais qui, à l’arrivée, déçoit. Car elle barre l’accès à une pension décente à de larges pans de travailleurs – et surtout de travailleuses. Et porte un coup aux chômeurs – même temporaires – qui se voient exclus du calcul (voir encadré). Un comble après la crise sanitaire.

En quelques points, l’on peut résumer la réforme des pensions comme suit. 20 années de travail effectif pour accéder à le pension minimum ; une solide atteinte au principe des périodes assimilées (c’est-à-dire à des périodes qui, jusqu’à, présent comptaient comme du travail effectif) ; rien pour les métiers pénibles. Dans son communiqué, la FGTB indique qu’il existe : « un décalage entre les mesures envisagées et la réalité du monde du travail. Comme nous l’avions pressenti, l’accès à la pension minimum, en particulier, sert de variable d’ajustement budgétaire. »

Le point

Interview expresse avec Thierry Bodson, Président de la FGTB, et Selena Carbonero, Secrétaire fédérale de la FGTB et responsable politique pour les pensions.

20 ans de travail effectif, c’est ce qu’il faudra, désormais, pour pouvoir prétendre à une pension minimum. Un certain nombre de périodes assimilées n’entrent plus dans le calcul. Pourquoi la FGTB s’y oppose-t-elle ?

TB : « Si l’on s’oppose à un calcul sur la base du travail effectif, c’est parce qu’immanquablement, des périodes qui devraient compter pour la pension ne le seront pas. Parmi elles, le chômage temporaire. On a pourtant vu comme ce système était essentiel pendant la pandémie. Au lendemain de cette crise, il est particulièrement inaudible et incompréhensible que ces périodes ne soient pas considérées comme du travail effectif ! »

SC : « Et quid des périodes de maladie ? On nous explique qu’avec la réforme, les périodes d’incapacité de travail seront « partiellement » prises en compte pour l’accès à la pension. Si on lit les choses autrement, ça veut dire que des travailleuses et travailleurs seront « partiellement » sanctionnés pour avoir été malades. Autrement dit, on reconnait que ne n’est pas de votre faute si vous êtes incapable de travailler, mais vous serez quand même partiellement puni.  Il aurait été cohérent de prendre en compte l’ensemble des périodes d’incapacité de travail. »

Que répondre à celles et ceux qui estiment que « 20 ans de travail, ce n’est pas grand-chose ? 

TB : « Alors oui, ça peut donner cette impression. Le problème c’est que pour les gens qui travaillent à temps partiel – et ça concerne principalement des femmes – le calcul est beaucoup plus compliqué. A titre d’exemple, 20 ans de travail cela signifie – pour les travailleurs et travailleuses à mi-temps – 32 années de travail effectif. Quoi qu’il en soit, un tiers des personnes qui pouvaient prétendre à la pension minimum avant la réforme pourraient perdre 200 à 300 euros par mois. »

La réforme des pensions va particulièrement s’attaquer aux femmes, une nouvelle fois ?

SC : « Oui… En partant du principe que ce sont généralement les femmes qui ont des carrières à temps partiel ou morcelées. La majorité des gens qui vont y perdre sont des femmes occupées dans des secteurs qui sont littéralement organisés autour du temps partiel. On ne leur propose rien d’autre. Et n’oublions pas qu’encore trop souvent, des femmes sont contraintes à réduire leur temps de travail, ou à interrompre leur carrière pour s’occuper d’un proche dépendant. Nous vivons encore dans une société où la répartition des rôles entre les hommes et femmes est stéréotypée, et où ces tâches informelles tombent quasi systématiquement sur les femmes. »

Quid des mécanismes de revalorisation des temps partiels, évoqués dans la réforme des pensions ?

SC : « Ils existent. Et on aurait pu s’en réjouir. Toutefois il est difficile d’en évaluer à ce stade l’impact. Cinq années au maximum de travail à temps partiel seront considérées comme des années à temps plein, si elles ont été prestées avant 2001. Cela réduit grandement l’impact potentiellement positif du mécanisme! »

Et la pénibilité ?

SC : Rien n’a été proposé pour prendre en compte les circonstances de pénibilité au travail, afin de pouvoir prendre sa retraite plus tôt. On sait que l’espérance de vie en bonne santé est en moyenne de 65 ans. Donc travailler au-delà, c’est déjà très difficile pour beaucoup de travailleurs et de travailleuses. L’augmentation du nombre de malades de longue durée âgés de 55 ans et plus en atteste.

Peut-on néanmoins souligner des avancées ?

TB : Grâce à la pression de la FGTB, une partie importante des périodes d’invalidité seront assimilées à du travail effectif. C’est une avancée et ça évite la « double peine » qui menaçait les personnes en invalidité.

SC : Nous avons dû nous mobiliser pendant de nombreuses années pour pousser la revendication des 1500 € net de pension. Cette revendication devrait être pleinement réalisée d’ici 2024 et on sera même un peu au-delà en raison des indexations. Toutefois, moins de personnes y auront accès…

La réintroduction du bonus pension amène une approche plus positive. On sort de la logique punitive. Mais pour pouvoir bénéficier du bonus pension, il faut être en état, physiquement, de travailler au-delà des conditions demandées pour avoir accès à la pension anticipée.

Une stigmatisation volontaire des chômeurs
Sur les réseaux sociaux et dans les médias, on lit entre les lignes (voire très clairement) que la droite, sous couvert de « récompense » envers « ceux qui travaillent », se réjouit surtout de pénaliser les chômeurs. Une stigmatisation volontaire, qui n’a qu’un but idéologique, selon Thierry Bodson.

« Il y a ce discours persistant contre les chômeurs qui demeure, et qui est particulièrement visible ici. On a devant nous une réforme qui va exclure les périodes de chômage pour le calcul de la pension. Ce, à une époque où, historiquement, le chômage n’a jamais été aussi bas, même à Bruxelles et en Wallonie. C’est de l’idéologie pure. Ce n’est même plus une question de budget. Car le problème dans notre société, et dans notre pays, ce n’est plus du tout le chômage. C’est juste une manière de stigmatiser ces gens. »  

Et de mettre en concurrence travailleurs actifs et inactifs, comme autant de bons et de mauvais sujets, et ainsi mettre à mal la solidarité.
Aurélie Vandecasteele
Rédactrice en chef, Syndicats Magazine, FGTB

20 réactions sur “Réforme des pensions | « 1/3 des gens qui pouvaient prétendre à la pension minimum pourraient perdre 200 à 300€/mois »

  1. 2024 c’est un peut tard la reform c’est maintenant qu’on a besoin pas dans 2 ans quand tout aura augmenter !!!!!!

  2. Bonjour je suis en invalidité depuis 1 an. 39 ans. de carrière
    À combien puis-je espérer à la date la plus proche de mon droit à la pension mai 2025 selon le site my pension. Be

  3. Bonjour, j’ai eu dans ma carrière professionnelle une période de travail de 20 ans, puis une période d’invalidité de presque 5 ans, puis une période de travail de 4 ans et maintenant je suis e’ invalidité depuis 2015. Qu’en est-il pour moi ? Buis Christine, Rue du Tombois 26 à 1367 Petit Rosière

    1. Bonjour,

      si vous cumulez 20 années de travail effectif, à minimum 4/5e temps, vous ouvrez votre accès à la pension minimum. Toutefois, en fonction de votre âge et de divers mécanismes de transition entre l’ancien et le nouveau système, il faudrait faire une évaluation précise de votre situation. Nous transmettons votre question à votre régionale FGTB.

  4. J ai travailler 14,5 ans en titre service je suis sur mutuelle depuis 20juillet 2019 depuis 20 juillet 21 je suis en invalidité plus de 66%jusque ma pension qu elle pension aurais je droit

    1. Bonjour,

      en l’état actuel de nos connaissances de la réforme, il nous est impossible de faire une évaluation précise des situations individuelles.
      En fonction de votre âge, des mécanismes de transition, mais aussi de la prise en compte même partielle des périodes d’incapacité de travail ou d’invalidité, la situation peut changer.
      Nous vous invitons à consulter le site du Service fédéral des pensions pour toute mise à jour.

  5. Bonsoir,
    Je dois travailler pendant 45 ans. D’accord, je le disais à 22 ans après mes études. J’ai passé dans tous les secteurs. Armée, imprimerie, sidérurgie., jardinage. Comment avoir une bonne pension avec toutes les fermetures d’entreprises. Je n’ai plus de voitures. Et pas de maison. Et cette année, ils ont doublé les provisions d’énergies. Pauvre pays???

  6. Bonjour j’ai 30 ans de carrière dont plus ou moins 4 ans à 3/4 temps (involontaire). Je travaille depuis 1992. Est-ce que je peux prétendre à une pension plus tôt ? Bon 21 juillet.

  7. Bonjour je veux comprendre avec les décisions prise cette semaine qu est qui en n est des 42 ans et 60 ans car pour moi c est un an des gagner.
    Merci

  8. Qu en est il des périodes d écartements pour grossesse ? Cela compte t il comme “maladie”. Je travaille dans les soins et de ce fait ai été écartée dès l annonce de ma grossesse. Cela veut il dire que je perds un an de travail effectif ??

  9. Et les personnes ( enseignants) qui ont été mises à la pension d’office pour raison de maladie avec moins de 20 on les a oublié ? Pas de choix de retravailler pour ces personnes !

  10. Plus de deux années au chômage temporaire dû aux restrictions délirantes Covid .
    On exempt les chômeurs temporaires de trouver du travail ailleurs et on leur demande de rester à la disposition de l’employeur en difficulté.
    Des décisions du conseil de la santé qui tombent tous les trois mois .
    Deux ans à tirer le diable par la queue, à continuer a payer ses cotisations syndicales plein pot ,à ne pas voir de bout de ce tunnel infernal , et in fine , se voir sanctionner et devoir culpabiliser .

    Les dégâts psychologiques , ils les chiffrent comment au fait ?

    Bravo les gars , bravo !

  11. Qu’en est il des carrières mixtes ?
    Activité à temps plein en Belgique pendant 8 ans, ensuite activité de 20 ans France, Période de chômage en Belgique de 2 ans , Période de travail de travail en Belgique 4 ans avec un PFI de 6 mois, Période de chômage de 4ans , Période de travail en Belgique de 2 ans , A nouveau chomâge depuis 2 ans
    Bonjour le calcul !
    Les périodes de chomage avant 2024 seront-elles prises en compte ? On ne change pas les règles en cours de route.
    Trouver du travail à 62 ans ressort du parcours du combattant. Autant pisser dans un violon !
    Vous ne plus travailler parce que vous êtes trop vieux, que vous habitez trop loin de l’entreprise (30 km !) , parce que vous êtes surqualifié pour les postes, que vous n’avez pas l’expérience du domaine d’activtité , … et j’en passe
    En gros on vous condamne à rester au chômage contre volonté pour ce qui me concerne jusqu’à 66 ans !
    Quand au travail en Flandres , à un certain niveau de hiérarchie , les postes sont réservés aux néerlandanphones (moedertaal) alors que vous parlez 3 langues !
    Quand le gouvernement demande aux plus âgés de travailler plus longtemps, de transmettre leur savoir , qu’il y a un manque de main d’oeuvre qualifiée !
    Que fait le gouvernement pour obliger les patrons à engager les plus de 55 ans voire les plus de 60 ans !
    Des formations j’en ai suivies aussi pour se recycler !

    Merci à nos gouvernements de prendre aussi les mesures adéquates aussi pour permettre aux personnes plus âgées souhaitants encore travailler du moins si elle le peuvent et le souhaitent en imposant des quotats comme on le fait pour les personnes handicapées (quotas qui ne sont d’ailleurs pas tenus)
    Je plains les personnes qui sont dans des situations beaucoup plus à plaindre que la mienne et que cette réforme va mettre à mal !

  12. J’ai travaillé pendant 10 ans mi temps car je suis une mère seule avec un enfant mais c’est ce qui j’avais trouvé aussi donc involontaire. Donc sont tous ces années perdues ?

  13. Je pose une question: J’ai travaillé pendant 10 ans comme indépendant. Et puis j’ai travaillé pendant 7 ans comme salarié et maintenant je pourrais aussi faire 8 ans comme fonctionnaire.
    Ma question est: Est-ce que je pourrai avoir droit à la pension minimum de 1500€

  14. Le PS n’a donc pas “pris ses responsabilité”, n’a pas été le “relai” du syndicat et n’a pas “mené bataille” pour nous défendre. Allez vous encore appeler à voter pour lui ? Allez vous encore siéger dans ses instances ? Allez vous encore défendre ses coalitions ? Allez vous encore rabâcher que “sans lui ça sera pire” ? Allez vous encore l’inviter aux congrès du syndicat ?

  15. Bonjour à toutes et tous,
    nous comprenons qu’il reste de nombreuses questions sans réponse aujourd’hui.
    L’équipe de Syndicats Magazine n’est pas en mesure de faire le calcul individuel de votre pension future. Nous n’avons pas non plus accès aux dossiers des affiliés.
    Nous reviendrons toutefois sur le sujet des pensions – et de la réforme – dès que possible.
    Merci de votre compréhension.

  16. J’ai ma pension à partir de 01/2023.et toucherai moins de 1500 euros. J’ai 40 ans de travail
    La réforme sera effective en 2024. Le montant de ma pension sera-t-il revu ? Merci

    1. Bonjour,
      en l’état de nos connaissances actuelles, les personnes âgées de 60 ans et plus aujourd’hui ne seront pas concernées par la réforme.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

Lire aussi x

Syndicats Magazine

GRATUIT
VOIR