Ces patrons qui veulent casser le droit de grève

Ces patrons qui veulent casser le droit de grève

Des informations nous sont parvenues selon lesquelles certains patrons essayent de dissuader les travailleurs et travailleuses de participer aux actions syndicales. Pire encore, ils proposent des avantages, des cadeaux, à ceux qui n’y participeraient pas. En cette période de forte mobilisation sociale, à la veille de la manifestation nationale du 20 juin, il est important de rappeler que les sanctions vis-à-vis des grévistes et l’octroi de primes aux non-grévistes sont interdits par la loi.

Un contexte intenable

La vie est de plus en plus chère. Les prix augmentent trop vite et de manière hallucinante. Les travailleurs sont les premiers à en ressentir le choc. Des témoignages glaçants nous parviennent. Manger moins à la fin du mois, avoir mal au ventre à l’idée de devoir remplir son réservoir d’essence pour aller bosser… Ce n’est plus tenable.

Plusieurs actions ont été organisées ces derniers mois dans les quatre coins de la Belgique, notamment en front commun syndical, pour défendre le pouvoir d’achat et les libertés syndicales. L’objectif : changer la loi sur la norme salariale qui empêche les syndicats de négocier de vraies augmentations. Une pétition a également été lancée dans ce sens. Elle a récolté près de 90.000 signatures en à peine 2,5 mois. Grâce à la mobilisation massive, tant dans les rues qu’en ligne, la loi sur la norme salariale fera l’objet d’un débat parlementaire en juin.

Soudoyer les travailleurs avec des cadeaux

Les actions sont largement suivies, parce qu’elles concernent directement la qualité de vie des gens. Mais certains patrons ont visiblement des difficultés à comprendre l’importance de ce genre de mobilisations massives et essayent de dissuader les travailleurs d’y participer. C’est le cas dans l’entreprise d’aide aux familles à laquelle Corinne Sotiau, déléguée FGTB Horval, travaille. « Nous étions 22 inscrites à la manifestation du 20 juin. Entretemps, 4 travailleuses se sont désistées, car elles reçoivent des pressions de la part de la direction ». Direction qui veut imposer une présence de 60% du personnel le jour de la manif. Or, comme expliqué par Corinne lors du dernier Comité d’Entreprise, il n’y a pas de service minimum dans son secteur. L’entreprise pourrait donc tourner le jour de la manif comme le w-e ou les jours fériés.

Les employeurs ont été jusqu’à promettre des casiers de bière à celles et ceux qui ne participeraient pas à l’action du 13 mai.

Ceci n’est malheureusement pas un cas isolé. Chez Trendy Foods à Chaineux, les employeurs ont été jusqu’à promettre des casiers de bière à celles et ceux qui ne participeraient pas à l’action du 13 mai. Ils ont également poussé ceux qui se mobiliseraient à faire des heures supplémentaires la veille de la manifestation. Résultat : 5 personnes n’y sont pas allées. « Il y a un traitement différent envers les grévistes et les non-grévistes » s’indigne la délégation syndicale de la FGTB Horval. « En plus, ils proposent de l’alcool pour soudoyer les travailleurs… c’est inacceptable ! ».

Une question de solidarité

« Ce qui est inadmissible, c’est cette incapacité de la direction à comprendre la situation des travailleurs et travailleuses », explique Corinne Sotiau. « Nous avons des mamans célibataires avec des enfants dans nos services. C’est compliqué pour elles de boucler les fin de mois ». La délégation de Trendy Foods, elle, nous explique que des travailleurs ont même dû demander des avances sur salaire pour payer leurs factures. « Si autant de personnes participent aux actions, il y a une raison. Elles sont directement touchées par l’augmentation des prix. Mais certaines sont également là par solidarité. » (…) « Nous avons pris le temps d’expliquer nos cahiers de revendications à la direction : la modification de la loi sur la marge salariale qui nous a imposé une marge salariale de 0.4% alors que l’entreprise a fait de gros bénéfices durant la crise du coronavirus ». Malheureusement cela n’a pas été suffisant…

La grève est un droit

Les manifestations du 13 mai et du 20 juin sont couvertes par un préavis de grève. Cela signifie notamment que les syndicats en ont formellement informé les fédérations patronales. Il n’y a pas lieu, pour les employeurs, d’essayer de dissuader les salariés  d’y participer dans des secteurs où le service minimum n’est pas d’application.

Rappelons aussi que l’exercice légitime du droit de grève ne peut en aucun cas donner lieu à une sanction, puisque les sanctions sont considérées comme une forme de discrimination antisyndicale. Les avantages proposés aux non-grévistes, constituent eux aussi une discrimination, interdite tant par la réglementation belge, qu’européenne et internationale. Une discrimination fondée sur la conviction syndicale dans le cadre des relations de travail ou des régimes complémentaires de sécurité sociale est passible d’une indemnité forfaitaire égale à 6 mois de salaire brut.

Pour aller plus loin

La FGTB publie régulièrement des brochures, tracts et autres outils pour informer les travailleurs et travailleuses sur leurs droits. Concernant le droit de grève et l’exercice du droit de grève, nous vous conseillons deux document utiles :

  • Le mémento pratique sur les actions collectives, disponible ici.
  • La brochure sur les libertés syndicales, disponible ici.
Ioanna Gimnopoulou
Journaliste, Syndicats Magazine

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