« Climate change », « changement climatique » ou simplement « el cambio ». Dans tous les coins du monde, c’est un signal d’alarme. Plus que jamais, le climat montre des changements violents, mais bouleverse aussi nos vies de manière plus subtile.
Un article proposé par FOS.
Si l’on se promène dans les Andes, en Amérique latine, les habitants vous parleront sans doute de « el cambio », littéralement « le changement ». La célèbre Cordillère Blanche, une vaste chaîne de montagnes au Pérou, perd ses glaciers à un rythme croissant. Pas de catastrophe majeure à l’heure actuelle, mais les effets sont néanmoins incalculables. Les eaux de fonte perturbent les infrastructures d’irrigation, dont beaucoup sont en service depuis des centaines d’années.
Les saisons changent et perturbent l’agriculture traditionnelle. Une conséquence qui pèse sur certains habitants, qui cultivent un lien mystique avec la nature. Ava, qui vend des produits naturels à Huaraz en tant qu’activité secondaire, constate au quotidien un changement sur l’humeur de la ville et ses résidents. « Le marché est l’endroit le plus animé de la ville », dit-elle. « Il attire des gens de toute la région qui vendent des légumes de leurs champs. Mais les rendements et la qualité ne sont plus aussi stables qu’avant. El cambio est le terme qui tue, pour expliquer votre mauvaise récolte. Un terme qui apporte le découragement et affecte l’ambiance en ville. »
Le climat change, les vies aussi
Le changement climatique impacte les vies. Cela vaut même dans des zones qui semblent moins vulnérables que les hautes montagnes. Exemple : au Zimbabwe, où 66 % de la population travaille dans l’agriculture. « Il faut y réfléchir suffisamment pour faire le lien », nous dit Sunwork Misiri. Sunwork travaille comme ouvrier dans une ferme géante, qui compte près de 7 000 employés dans la région de Mashonaland. « Notre patron engage de moins en moins de personnes pour s’occuper du bétail car il y a de moins en moins de pâturages. Moins de pâturages car plus de désertification. Désertification causée par la déforestation. Nous contribuons nous-mêmes au changement climatique, et les précipitations changent à cause du réchauffement climatique. »
Sunwork poursuit. « En tant que travailleurs, nous avons de moins en moins accès à des légumes de bonne qualité. C’est parce qu’il y a de moins en moins d’emploi et que les revenus des familles diminuent, mais aussi parce que nos jardins produisent moins. Ceci est dû au fait que les canaux d’irrigation ne fonctionnent plus aussi bien, suite à une forte tempête qui a endommagé le barrage local. Moins d’eau s’écoule, à la fois vers la ferme et vers nos jardins. Ces fortes averses sont aussi dues au changement climatique. »
L’inégalité amplifiée
Les gens comme Alva et Sunwork sont particulièrement vulnérables. Tous deux travaillent dans l’agro-industrie, dans des régions plus exposées, où peu d’emplois alternatifs et décents sont disponibles. Ils ont peu accès à la protection sociale et leurs gouvernements peinent à prendre des mesures pour lutter contre le changement climatique. Mais surtout : localement, leurs voix sont moins entendues que celles de leurs patrons ou de leurs gouvernements. Globalement, moins que celles des pays riches, qui contribuent pourtant beaucoup plus au changement climatique.
Mais leur histoire prouve également que le combat pour leurs droits, à un emploi décent, à une sécurité alimentaire et à la santé, coïncide avec celui pour la justice climatique. Alors, que faire? S’unir. Depuis des décennies, les organisations de femmes, les mouvements indigènes et les syndicats font le lien entre climat et qualité de vie. Et ils pensent déjà à l’avenir. Ils unissent leurs forces et présentent des projets audacieux. Ils s’engagent en faveur d’une transition juste : le passage à une nouvelle économie, qui protège la nature et place l’humain au centre.
La transition doit être juste
En 2015, l’Organisation internationale du travail (OIT) publiait ses lignes directrices pour une transition juste. Grâce à elles, les travailleurs, les employeurs et les gouvernements sont amenés à favoriser la transition vers des économies et des sociétés vertes et neutres sur le plan climatique. L’OIT et toutes les parties prenantes veulent œuvrer à une transition juste, qui tient compte du dialogue social et des droits fondamentaux du travail. Parce qu’une transition qui laisse tomber les gens est vouée à l’échec.
Entre-temps, la transition a déjà commencé. Gapwuz, le syndicat des travailleurs agricoles zimbabwéens de Sunwork, s’est engagé à assurer une transition juste dans les années à venir. Au niveau national, le syndicat plaide auprès du gouvernement pour un renforcement de la protection sociale. Ce, afin que les victimes du changement climatique disposent d’un filet de sécurité. Au niveau sectoriel, Gapwuz fait pression sur les employeurs et les décideurs politiques pour qu’ils identifient les risques et y travaillent, avec le syndicat. Le syndicat informe alors les délégués des risques causés par le changement climatique. Au niveau de l’entreprise, les délégués insistent sur la collecte d’informations relatives au climat, afin d’adapter les politiques agricoles à la nouvelle réalité.