La conférence annuelle sur le climat se tient cette année à Sharm-el-Sheikh en Egypte. Sacha Dierckx, du service d’études de la FGTB, est sur place et nous décrit l’ambiance et la teneur de ce sommet. Voici sa première contribution.
« Me voilà arrivé à Sharm-el-Sheikh. Jamais je n’aurais pensé venir ici. Je suis là, pour la COP27, le sommet climatique international annuel. Chaque année, un pays en assure l’organisation. Pour 2022, l’Egypte était le seul candidat. C’est ainsi que pour deux semaines, Sharm-El-Sheikh s’est transformée en Sharm-El-Show. »
« Events & rooms »
Un grand show, c’est ce que découvre Sacha Dierckx à son arrivée. Des chefs d’Etat, les pavillons des différents pays et organisations ùù se tiennent toutes sortes de débats et d’événements où l’on négocie sur différents thèmes. « Il est peu probable que ces espaces de négociation accueillent des débats de fond. Ainsi, il sera peu question du système capitaliste – et de sa soif de profits – qui est à l’origine des problèmes de la planète et des individus. Bien sûr, les activistes présents aux événements en marge évoqueront un impôt sur la fortune ou une taxe sur les surprofits. Mais ces points ne sont absolument pas à l’ordre du jour des négociations officielles, même si certains pays pauvres plaident pour une taxe sur les surprofits pour les entreprises fossiles. »
De petits pas en avant
« Même si un seul sommet de ce type (la « Conférence des parties ») ne changera probablement pas le monde de sitôt, il est néanmoins nécessaire de l’organiser. Car même un petit pas en avant constitue une avancée. » Avancée plus que nécessaire puisque tous les rapports publiés peu avant la COP indiquent que les plans dressés par les différents pays sont totalement insuffisants pour garder le réchauffement climatique sous la barre des 1,5°C. « De plus, plan ne veut pas encore dire action. Entre l’acte et la parole, il y a souvent un fossé. Enfin, dans les objectifs, il y a souvent beaucoup d’incertitudes… Les objectifs des pays plus pauvres dépendent d’un financement – incertain – des pays plus riches. »
Droits humains et syndicaux
La présence des syndicats, des ONG et de la jeunesse à la COP est également uné nécessité. « D’abord, pour dénoncer la situation des droits humains en Egypte, pays dont le bilan en matière de droits humains et syndicaux est catastrophique. La situation du détenu politique Alaa Abd el Fattah, qui mène depuis un certain temps déjà une grève de la faim, mais qui refuserait à présent aussi de boire en est un triste exemple. »
Lettre ouverte
Selon le Global Rights Index de la CSI, l’Egypte serait l’un des 10 pires pays au monde pour les travailleurs. « Alors que le premier Ministre Alexander De Croo n’a apparemment pas jugé utile d’évoquer les droits humains dans son discours à la COP 27, la FGTB avait signé, avant la COP déjà, une lettre ouverte de la société civile sur la situation. Et sur place, nous avons participé à une action des organisations de la société civile internationale pour dénoncer la violation des droits humains dans le monde entier. »
Les bénéfices avant le bien-être
Les syndicats, les ONG et les jeunes, par leur présence, rappellent des priorités qui – sans eux – ne seraient pas mises sur la table. « Nous devons non seulement nous battre contre un système économique qui donne une bien plus grande priorité aux bénéfices qu’au bien-être des individus et de la planète, mais aussi contre les nombreux lobbyistes présents à la COP27. Avec la CSI, nous nous battons pour une ‘Transition juste’. Cela signifie que nous voulons une politique climatique équitable où les travailleurs ont droit au chapitre. Une politique qui leur offrira la sécurité pour l’avenir, avec notamment plus d’emplois de qualité et de protection sociale. Une politique qui réduira les inégalités au lieu de les exacerber. »
Indemnités
« Parallèlement, nous soutenons ici les nombreuses revendications des ONG. Ainsi, en Egypte, pour la première fois, outre la réduction des émissions de CO2 et la protection contre les conséquences du changement climatique, la problématique des ‘Loss & Damage’ a véritablement été mise à l’agenda. Il est donc question d’un mécanisme de financement en compensation des pertes et dommages provoqués par les catastrophes climatiques, surtout dans les pays pauvres« , poursuit Sacha Dierckx.
En Wallonie, l’on a déjà pu constater les ravages qu’ont provoqués les inondations de 2021. « Mais au Pakistan, d’autres inondations ont pris une autre mesure : plus de 1.700 personnes ont perdu la vie, plus de 2 millions d’habitations ont été détruites, 410 ponts ont été endommagés, près de 13.000 kilomètres de route ont été détériorés. Les pays occidentaux qui, par leurs émissions historiques de gaz à effet de serre, sont responsables du dérèglement climatique, sont toutefois très réticents lorsqu’il est question d’accepter un mécanisme de financement pour ces ‘pertes et dommages’ ». »
Solidarité climatique ou suicide collectif
Sacha Dierckx conclut ainsi ce premier rapport. « Je terminerai par une citation du Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, à ce sommet climatique: ‘Le pied toujours enfoncé sur l’accélérateur, nous continuons à rouler sur cette autoroute vers l’enfer climatique. (…) L’humanité a le choix : coopérer ou sombrer. Un choix entre un Pacte de solidarité climatique – ou un Pacte pour un suicide collectif’ ».
Dans les prochains jours et semaines, nous publierons ici la suite des impressions de notre correspondant sur place.