Les femmes, actrices principales des luttes sociales d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Le magazine Syndicats leur rend hommage dans cette rubrique. Tous les mois nous présentons une militante de la FGTB : son histoire, ses luttes, ses craintes, ses aspirations. Aujourd’hui, c’est au tour de Jennifer Van der Linden, déléguée MWB.
Jennifer Van der Linden est une jeune femme engagée, énergique. Elle a le regard déterminé, le ton sûr. À 30 ans, elle exerce un métier traditionnellement masculin : mécanicienne automobile. Jennifer travaille chez Touring, à Forest.
Un chemin tout tracé ? Oui, mais qui n’est pas apparu comme une évidence au départ. « J’ai fait beaucoup de choses avant de trouver ma voie », confie la jeune femme. « J’étais partie vers l’hôtellerie au départ, l’événementiel, mais ça ne me plaisait pas. Mes deux grands-pères étaient mécaniciens. L’un pour les poids-lourds, l’autre pour les avions. Mon père également. Il travaillait lui aussi chez Touring, comme mécanicien automobile.«
Le franc tombe : Jennifer aussi va se tourner vers la mécanique. « Je me suis dit : « Pourquoi ne pas reprendre des cours ? ». J’ai lâché mon CDI de l’époque, et j’ai suivi trois années de cours à temps plein, en mécanique automobile, via Bruxelles Formation. »
Le profil de Jennifer, dans ce contexte, est atypique. Et ne plaît pas forcément. « Il fallait réussir des tests, et les 15 meilleurs candidats étaient retenus pour poursuivre la formation. Nous étions une centaine au départ, et j’étais la seule femme… J’ai été huée par d’autres. On m’a dit que ce n’était pas ma place. Mais j’ai quand même été parmi les 15 meilleurs ! Et une belle ambiance s’est installée entre nous.«
Plusieurs stages en entreprises plus tard, Jennifer décroche, à nouveau, un CDI. Une reconversion qui sonne comme un passage de témoin. « Mon papa a pris sa pension quand je suis arrivée ! » Là encore, Jennifer est la seule femme à travailler dans le garage. Mais là, pas d’insultes, pas de discrimination. « J’ai de la chance. Je ne subis pas de sexisme sur mon lieu de travail. Quand c’est juste, il faut le dire. De plus, quand j’ai commencé, mon chef d’atelier était délégué principal, et il protégeait beaucoup les jeunes.«
Premier mandat
Le goût pour la mécanique n’est pas la seule chose que Jennifer tient de son papa. C’est également lui qui l’a incitée à faire ses premiers pas dans le milieu syndical, chez les Métallos. « On me dit souvent que je suis comme mon père ! Il était délégué, vers la fin de sa carrière. Il m’a poussée à m’inscrire sur les listes. » Une initiative assez récente, puisque Jennifer participe pour la première fois aux élections sociales en 2020. Elle en ressort avec un mandat au CPPT.
Jennifer est active dans la défense des jeunes, des femmes, des aînés. Son engagement est mu par une soif de justice sociale. « Je me bats pour que ce soit juste. Pour que tout le monde soit traité de la même manière, pour que les règles soient appliquées comme il se doit. Quand je discute avec des jeunes, je constate à regret qu’ils ne sont pas intéressés par le combat social. Il manque cruellement de jeunes dans nos rangs. C’est lié à plusieurs choses : un manque de connaissance de l’histoire sociale, mais aussi un manque d’argent, parfois, qui fait qu’on accepte de travailler à n’importe quelle condition. Il manque cruellement de jeunes au niveau du syndicat.»
Connaître l’Histoire
L’histoire sociale, c’est ce qui a ancré Jennifer dans son engagement syndical. « Les combats de nos grands-parents nous ont permis d’être éduqués. D’avoir des congés payés, un congé de maternité. Ce ne sont pas des choses que l’on apprend à l’école, et c’est dommage. Si j’avais su tout ça plus tôt, je me serais impliquée avant. Je pense qu’on vit dans un monde où l’on ne montre plus les réalités et difficultés d’autrefois à nos enfants, et c’est dommage. Les aînés se sont battus pour tout ce que nous avons aujourd’hui. Il faut défendre tout ça.«
Jennifer se décrit comme une personne ouverte, à l’écoute. « Les gens viennent très facilement me parler, de tout. J’ai encore reçu un message ce matin. Je suis une tombe, aussi ! C’est important. »
La jeune déléguée ne compte pas s’arrêter en si bon chemin. « Je vais continuer. Ça me plaît. Bien sûr, comme c’est mon premier mandat, il arrive que je ne sache pas répondre à toutes les questions. Ça demande une remise en question, un apprentissage. J’observe, je lis. Notre entreprise a connu beaucoup de changements ces dernières années, avec une nouvelle direction, le départ d’anciens délégués, une reprise… Il y a encore des craintes, des défis à relever. » Souhaitons bonne chance à Jennifer pour la suite de son parcours!